Le beau travail de Kraftwerk


(photo de pH)
A contre courant. Ils sont raides, vieux, habillés de costumes rayés improbables, impassibles. Ils nous font face. Pas un mot pour nous, à peine un regard de temps en temps, un regard amusé car nous aussi nous avons un drôle d’air avec nos lunettes blanches carrées. Nous sommes plus de 1000, ils sont 4. Les images volontairement simplistes envahissent la salle, les mouvements sont souvent lents, les couleurs primaires, parfois ce n’est que du noir et blanc. L’un chante parfois en allemand, avec maladresse, du bout des lèvres. C’est un spectacle total ou la parole est donnée au machines, totalement donnée. Et cela reste assez radical et pertinent.
Froideur, mécanique, bruit blanc, sons bruts, voix désincarnées, images en 3D, typographie soviétique, angles sévères. Au milieu de ce déluge froid comme du métal, les mélodies et la voix de l’homme s’accrochent et tissent les fils d’une poésie moderne toujours bouleversante, 30 ans après.
C’est aussi ressentir les vibrations d’un engagement artistique assez radical, bien que malin dans ces mélodies un rien faciles sur disque mais bien plus convaincantes en live, au delà de la séduction bon marché des hâbleurs à paillettes qui pullulent en front de scène.
Je me suis vu dans ce que j’imaginais adolescent être un concert du futur, en lévitation dans le dôme d’un cargo spatial en route pour une destination inconnue. Ce soir c’était le cargo KraftwerK. Excitation du voyage, frissons sous les infrabasses, exposés aux particules invisibles hautement radioactive du vent solaire. Nous approchons du trou noir, nous sommes mortels et effrayés, mais c’est délicieux.
C’est aussi se rappeler que proposer au public c’est l’amener à soi, avec respect mais en allant jusqu’au bout de soi-même, avec sa fragilité, sa maladresse, son humanité. Comme les papys teutons. En apparence introvertis et désincarnés, ils ont tout donné, généreusement, au-delà de leur enveloppe humanoïde. Certains ne supportent pas et n’y voient que repli sur soi et déshumanisation, alors que comme toute bonne SF ce concept s’adresse à nous ici, parle de notre présent avec une certaine acuité, avec les outils du futur.
Amen.
Petite revue de presse de compte rendu des concerts. C’est très drôle de voir que chaque journal reste droit dans ses stéréotypes, ses manières de voir l’évènement. Formatés donc (mais c’est aussi ma propre vision de ce je n’attends pas de ce genre de critique!).
Le figaro, mérite, hit parade, superficiel, respect

Paris match, superficiel, hors sujet

Les inrocks, snob, mauvaise foi, condescendant, jeunisme